« Que peut-il ? Tout. Qu’a-t-il fait ? Rien.
Avec cette pleine puissance, en huit mois un homme de génie eût changé la face de la France, de l’Europe peut-être. Seulement voilà, il a pris la France et n’en sait rien faire.
Dieu sait pourtant que le Président se démène : il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ; ne pouvant créer, il décrète ; il cherche à donner le change sur sa nullité ; c’est le mouvement perpétuel ; mais, hélas ! cette roue tourne à vide…
Ce faquin dit à la France qu’il l’a sauvée ! Et de qui ? d’elle-même ! Avant lui la providence ne faisait que des sottises; le bon Dieu l’a attendu pour tout remettre en ordre; enfin il est venu ! Depuis trente-six ans il y avait en France toutes sortes de choses pernicieuses…
L’homme qui, après sa prise du pouvoir a épousé une princesse étrangère, est un carriériste avantageux… Il a des caprices, il faut qu’il les satisfasse… Il aime la gloriole, les paillettes, les grands mots, ce qui sonne, ce qui brille, toutes les verroteries du pouvoir… Il a pour lui désormais l’argent,… la banque, la bourse,… et tous ces hommes qui passent si facilement d’un bord à l’autre quand il n’y a à enjamber que de la honte.
Triste spectacle que celui du galop, à travers l’absurde, d’un homme médiocre échappé. »
Victor Hugo, 5 août 1852, Bruxelles, « Napoléon, le petit » (surnommé Naboléon par Hugo)